Lorsque le lien de filiation établi entre un père et un enfant ne correspond pas à la réalité biologique ou qu’il est entaché d’erreurs, il est possible de le contester par voie judiciaire. L’action en contestation de paternité vise à rompre ce lien juridique injustifié et peut être engagée par plusieurs personnes sous certaines conditions strictes. Voici les règles juridiques, les étapes de la procédure et les conséquences à connaître.
Les différentes formes de filiation
Avant d’engager une action, il est nécessaire d’identifier la nature de la filiation en cause, car celle-ci détermine la recevabilité de la contestation.
- La filiation biologique : établie par l’acte de naissance ou par une reconnaissance volontaire.
- La filiation adoptive : créée par une décision judiciaire dans le cadre d’une adoption simple ou plénière.
- La filiation par procréation médicalement assistée (PMA) : dans ce cas, la filiation ne peut plus être contestée si les deux parents ont consenti à la PMA, comme prévu à l’article 342-10 du Code civil.
Qu’est-ce qu’une action en contestation de paternité ?
Cette procédure permet de faire annuler un lien de paternité établi à tort. Elle est encadrée par l’article 332 du Code civil, qui impose de prouver que l’homme désigné comme père n’est pas le véritable géniteur. Le moyen de preuve le plus fréquent est l’expertise biologique (test ADN), ordonnée par le juge. Le consentement de la personne concernée est requis, mais un refus injustifié peut être interprété comme un indice de non-paternité (Cass. civ. 1re, 8 juillet 2020).
La possession d’état : un obstacle à la contestation
Lorsqu’un homme élève un enfant comme le sien et que ce comportement est reconnu par l’entourage et les institutions, on parle de « possession d’état ». Celle-ci peut rendre la paternité difficilement contestable si elle est établie depuis plus de cinq ans.
Pour être reconnue, la possession d’état doit être :
- Constante et durable ;
- Publique, reconnue par la société ;
- Paisible, sans conflit ni violence ;
- Non équivoque, sans ambiguïté quant à l’intention d’agir comme père.
Quels sont les délais pour agir ?
Le droit encadre strictement les délais de contestation :
- En cas de possession d’état : l’action est possible dans un délai de 5 ans à compter de sa cessation (article 333 du Code civil).
- Sans possession d’état : le délai est de 10 ans à compter de la majorité de l’enfant ou de la découverte de l’erreur.
Passé ces délais, l’action devient irrecevable. Il est donc essentiel d’agir rapidement dès l’apparition d’un doute ou d’un élément nouveau.
Qui peut engager une contestation de paternité ?
L’action en contestation peut être engagée par :
- Le père légal (reconnaissant vouloir annuler sa paternité) ;
- La mère de l’enfant ;
- L’enfant lui-même (ou son représentant légal s’il est mineur) ;
- Les héritiers du père si celui-ci est décédé ;
- Le ministère public en cas de fraude ou irrégularité manifeste.
Comment se déroule la procédure ?
La contestation est portée devant le tribunal judiciaire compétent. L’assistance d’un avocat est obligatoire. Une assignation est déposée et le juge peut ordonner une expertise génétique. Le refus de se soumettre à cette expertise, s’il est injustifié, est souvent retenu comme présomption de non-paternité.
Les démarches doivent être précises et argumentées, car elles peuvent avoir des conséquences importantes sur l’état civil et les droits de l’enfant.
Quelles conséquences en cas de succès ?
Si le juge fait droit à la demande de contestation, plusieurs effets juridiques sont à prévoir :
- Suppression du lien de filiation ;
- Retrait du nom du père sur l’acte de naissance ;
- Perte des droits successoraux pour l’enfant à l’égard du père ;
- Fin de l’autorité parentale du père reconnu à tort.
Il est néanmoins possible, dans l’intérêt de l’enfant, que le juge accorde un droit de visite ou d’hébergement à l’ex-père, notamment si un lien affectif fort existe entre eux.